⇒ Remarques à propos du régime de la microentreprise :
« Les travailleurs indépendants relevant du régime micro-fiscal relèvent du régime social de droit commun mais ils peuvent, sur simple demande, opter pour le régime micro-social. La loi Pinel du 14 juin 2014 a aligné les deux régimes en prévoyant que les entrepreneurs relevant du régime micro-social relèvent automatiquement du régime micro-fiscal…. »« Ce statut devait s’appliquer également à toutes les micro-entreprises jusqu’ici soumises, sauf option contraire, au régime de droit commun, au 1er janvier 2016. Un décret était attendu, qui allait, par l’adoption obligatoire par les micro-entrepreneurs du régime micro-social, consacrer la fusion de la micro-entreprise et de l’auto-entrepreneur, cette dernière appellation devant par ailleurs disparaître. »
« Puis, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 a finalement instauré une transition plus douce. Son article 142 a en effet reporté à 2020 l’obligation pour les micro-entreprises, initialement prévue au 1er janvier 2016, de basculer dans le régime micro-social.
Le Gouvernement a donc demandé à l’automne 2015, 16 mois après l’adoption de la loi Pinel et quelques mois avant l’échéance annoncée pour le basculement, un délai supplémentaire de quatre ans pour basculer automatiquement 160 000 personnes relevant du régime micro-fiscal dans le régime micro-social, sachant que ce régime ne leur est pas forcément plus favorable et, qu’en tout état de cause, la possibilité leur est ouverte de revenir au droit commun.
Avant même son entrée en vigueur, le régime « micro » unifié a donc dû être modifié deux fois. »
« Par ailleurs, le doublement des seuils d’imposition, opéré dans la dernière loi de finances, traduisant un engagement de la campagne présidentielle et une annonce présidentielle du 5 septembre 2017 dans le cadre du programme en faveur des travailleurs indépendants, a été accueilli favorablement dans un premier temps, mais suscite désormais certaines interrogations et réserves (les limites de la franchise en base de TVA n’ont pas été modifiées). »
A titre d’exemple, pour un chiffre d’affaires de 30 000€ :
– un coiffeur à domicile paiera 6 900€ de cotisations sociales en tant que microentrepreneur, contre 5 649€ au réel ;
– un vendeur de vêtements paiera 3 960€ par an, contre 2 215€ s’il était au réel ;
– un micro-entrepreneur maçon acquittera 6 900€ par an, contre 4 144€ au réel.
⇒ Remarques à propos des formalités administratives lors du cycle de vie de l’entreprise
Grâce à son maillage territorial, les 134 greffes des Tribunaux de commerce, sont considérés par les entreprises comme l’interface la plus accessible et la plus rapide, étant largement dématérialisée; Infogreffe compte au total 5,5 millions d’assujettis.La dématérialisation des formalités a progressé de 100% en 2017 avec 380 000 actes, à comparer aux 54 975 dossiers transmis en 2017 via guichetentreprises.fr. Excepté les cessions de parts, l’ensemble des actes concernant la vie de l’entreprise est désormais dématérialisable.
Toutes les sociétés françaises, immatriculées au registre du commerce et des sociétés, antérieurement au 1er août 2017, doivent, avant le 1er avril 2018, déclarer au greffe ses bénéficiaires effectifs, au moyen d’une déclaration, qui est déposée en annexe au registre du commerce et des sociétés. Le bénéficiaire effectif est défini comme la ou les personnes physiques qui possèdent ou contrôlent, directement ou indirectement, une entité juridique, support d’activités économiques ou financières. Le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce a élaboré des modèles de déclaration appelés « document d’identification relatif au bénéficiaire effectif » et propose 15 schémas pour identifier le bénéficiaire effectif.
Le coût de cette nouvelle formalité est de 24,80 à 54,42€ pour chaque société, auxquels s’ajoutent les frais demandés par les conseils, entre 100 et 200€.
Les entreprises commerciales doivent publier les annonces concernant les actes enregistrés au RCS (ventes et cessions, immatriculations et créations d’établissement, modifications et radiations de personnes physiques ou morales inscrites au RCS, procédures collectives, avis de dépôt des comptes des sociétés) soit au BODACC, soit dans un journal d’annonces légales. Cependant, dans les deux cas, ce sont les greffes des tribunaux de commerce qui assurent également la responsabilité de l’enregistrement, de la saisie de l’intégralité des informations obligatoires nécessaires à la publication des insertions au BODACC et de leur transmission à la Direction de l’Information Légale et Administrative. On peut donc s’interroger sur le contenu effectif de la prestation du BODACC qui est facturée aux entreprises, lesquelles ont le sentiment justifié de devoir payer deux fois pour la même obligation d’information.
⇒ Le prélèvement à la source
Le prélèvement à la source (PAS) « génère une charge de gestion nouvelle pour les tiers payeurs à qui est confié le précompte de l’impôt ». L’étude du Conseil des prélèvements obligatoires évalue la charge administrative supplémentaire à environ 1,2Md€ la première année, et un coût récurrent de l’ordre de 100M€, en amortissant l’investissement initial sur 10 ans.Environ 75% du coût total de la mesure sera porté par les TPE; environ 50% du coût de la mesure correspond à des revenus supplémentaires pour des prestataires de services spécialisés (experts comptables, éditeurs de logiciel) et 50% à un accroissement des coûts salariaux des entreprises.
La mesure prévoyant la possibilité pour les TPE de ne reverser au Trésor l’impôt collecté que tous les trois mois ne procure qu’un gain financier faible évalué à environ 12€ en moyenne par entreprise, soit 20M€ au total.
⇒ TPE, PME, ETI, des tailles insuffisantes comparées à celles de l’UE
Les entreprises par taille : en 2014, si la France comptait 50% d’entreprises employant de 1 à 9 salariés de plus que l’Allemagne (2 991 860 contre 2 074 830), elle en comptait 3 fois moins au-delà de dix salariés : 73 254 contre 229 590 pour les 10-19 salariés (3,1 fois moins), 45 700 vs 113 213 dans la tranche des 20-49 salariés (2,5 fois moins), 19 254 vs 55 981 dans la tranche des 50-249 salariés (2,9 fois moins), 4 154 vs 11 046 dans la tranche des 250 salariés et plus (2,7 fois moins).Au regard de nos voisins, la France compte moins d’ETI : 5 300 contre 8 000 en Italie ou en Espagne, 10 500 en Grande-Bretagne et 12 500 en Allemagne.
Comparé aux autres pays d’Europe, les entreprises françaises à forte croissance sont peu nombreuses. Selon une étude de la Commission européenne d’avril 2018, on comptait, en 2016, 180 000 entreprises de cette catégorie contre 158 000 en 2015 (+ 13%) et 144 000 en 2014 (+ 7%), et employaient environ 15 millions de personnes dans l’Union européenne. Les entreprises à forte croissance ne représentaient que 8,5% des entreprises du secteur marchand en France (pour une moyenne européenne de 9,9%), soit la 19ème place sur 24 économies étudiées en 2015. En valeur absolue de ces entreprises à forte croissance, la France, bien qu’occupant la 4ème place avec 17 000 entreprises, comme l’Espagne, reste encore loin de l’Allemagne (37 662 entreprises) et de la Grande-Bretagne (26 000) mais devance l’Italie (15 000).
En 2017, l’Europe compte 57 licornes, dont 3 françaises, mais 41% des licornes dans le monde sont américaines, et 37% chinoises. Le Royaume-Uni compte 22 licornes, suivi par la Suède (7) et l’Allemagne (7). La France reste à 3 (Blablacar, Criteo et Vente-privée). Contrairement aux économies britanniques et allemandes, la France n’a engendré aucune nouvelle licorne en 2017.
Néanmoins, malgré cette accélération notable, l’Europe reste à la traîne. En effet, l’an dernier, 30 nouvelles licornes ont vu le jour en Asie, et 37 aux États-Unis mais seulement 9 en Europe. Au-delà, et très loin du monde des PME-ETI, une licorne qui réussit se transforme en titan lorsqu’elle est valorisée à plus de 50Md$. Comme, parmi ces 57 licornes européennes, seules trois dépassent les 10Md$ de valorisation, les entreprises européennes sont donc encore loin de pouvoir créer leur premier « titan ».
La France manque de réussites entrepreneuriales récentes : sur les 100 premières entreprises françaises, une seule avait moins de 30 ans (Free) en 2014. Sur les 100 premières européennes, elles étaient 9. Sur les 100 premières américaines, elles étaient 63.
⇒ Les seuils d’entreprise
La France compte aujourd’hui 2,4 fois plus d’entreprises de 49 que de 51 salariés; le franchissement du seuil de 50 salariés déclenche 35 obligations administratives et financières supplémentaires et un coût estimé à 4% de la masse salariale.Au fil des années, l’enrichissement du cadre législatif a fait apparaître des effets de seuil, incitant les employeurs à limiter la croissance de leur entreprise ou à contourner la réglementation, en créant par exemple des structures indépendantes, pour ne pas dépasser 10, 20 ou 50 salariés. La probabilité de croissance de l’emploi diminue à mesure que les entreprises approchent ce niveau d’effectif.
L’approche par le cycle de vie des entreprises fait apparaître deux segments de tailles sensibles pour les PME : le seuil de 50 et celui de 250 salariés. En effet, les moyennes entreprises subissent une double contrainte. Une fois le seuil de 50 salariés franchi, le rythme de création d’emplois des moyennes entreprises ralentit alors que chaque point de croissance en taille requiert un sacrifice en EBITDA tout aussi grand que pour les entreprises plus petites. Ce n’est que lorsque l’entreprise franchit le seuil des 250 salariés que la croissance en effectifs est moitié moins coûteuse en EBITDA.
Il y a 1,8 fois plus d’entreprises de 48 et 49 salariés en France qu’en Allemagne.
⇒ Franchir la « vallée de la mort » dans le cycle de croissance de l’entreprise
Malgré le renforcement de l’écosystème de financement des start-ups, la « vallée de la mort », période délicate où les jeunes pousses entre 1 et 3 ans meurent par manque d’accès au financement, n’a pas disparu en France.Il est toujours difficile pour les entreprises, après un et trois ans, voire cinq ans, de traverser le passage délicat où elles ne dégagent toujours pas de bénéfice alors qu’elles ont besoin de cash supplémentaire pour financer leur croissance, dénicher de nouveaux marchés (notamment à l’international) et se faire connaître du public. La mortalité des start-ups culmine autour du deuxième anniversaire, c’est-à-dire au moment où les entrepreneurs arrivent au bout de leurs fonds propres, alors même que la création de valeur de leur start-up est toujours faible. Il manque toujours des investisseurs capables de financer des tours de table supérieurs à 20M€, qui restent rares en France.
⇒ Crowdfunding, business angels
Faire appel à une plateforme de crowdfunding a un coût non négligeable (commissions de 4 à 12% du financement obtenu et généralement prélevées).Il n’existe que 4 500 business angels en France, ayant investi 43Md€ en 2016, contre 20 000 en Grande-Bretagne, ayant investi 300Md€, presque 7 fois plus. Non seulement les business angels sont moins nombreux en France mais ils apportent des montants bien plus faibles aux projets qu’ils soutiennent, comparativement à leurs homologues étrangers.
⇒ Les aides aux entreprises
Le portail aides-entreprises.fr recense à ce jour 1654 dispositifs d’aide aux entreprises.le Gouvernement a décidé fin 2012 la mise en place d’une base de données unique sur les aides publiques aux entreprises : l’Observatoire des aides aux entreprises de l’Institut supérieur des métiers disponible à l’adresse www.aides-entreprises.fr. Sa mise en ligne est effective depuis le 24 janvier 2017.
Cet observatoire offre une information complète et actualisée sur plus de « 2 000 aides » aux entreprises, à l’échelle locale, nationale ou européenne et oriente le demandeur vers l’interlocuteur de référence sur chaque dispositif visé.
« Lire d’autres articles et analyses sur l'entreprenariat TPE / PME de notre expert André Letowski »