Combien télétravaillent ?
Aujourd’hui, selon la définition et le champ retenus, ainsi que le mode de collecte, la mesure de la fréquence du télétravail en France varie sensiblement : 4 % des salariés sont en télétravail régulier selon Eurofound-BIT ; 14 % des salariés travaillant dans un bureau pratiquent le télétravail (ou le travail nomade) de façon régulière et 10 % de façon ponctuelle selon Ipsos ; 13 % des salariés du secteur privé (établissements de 10 salariés ou plus) le font de façon régulière, de façon officielle ou non et 16% de façon occasionnelle et non contractualisée selon Ifop ; 17 % des actifs occupés télétravaillent selon LBMG Worklabs.En 2003, 2 % des salariés étaient considérés comme des télétravailleurs à domicile et 5 % comme des télétravailleurs nomades.
D’après l’enquête Sumer, en 2017, 3 % des salariés pratiquent le télétravail régulièrement (au moins 1 jour par semaine). Parmi eux, 45,3 % (soit 1,4 % des salariés) le pratiquent un jour par semaine, 26,3 % deux jours par semaine et 29,3 % trois jours ou plus par semaine.
Qui sont ceux qui font du télétravail ?
- Les télétravailleurs réguliers sont essentiellement des salariés qualifiés : 60,6 % des cadres alors que cette catégorie socioprofessionnelle ne représente que 16,9 % des salariés. Ainsi, 11,1 % des cadres et 3,2 % des professions intermédiaires déclarent pratiquer le télétravail au moins un jour par semaine. Sa pratique est marginale chez les employés (1,4 %) et quasi inexistante chez les ouvriers (0,2 %).
Ces très forts écarts reflètent notamment des disparités d’usage des outils numériques. En 2013, 52 % des cadres et 19,3 % des salariés exerçant une profession intermédiaire étaient équipés d’outils numériques permettant le travail à distance, contre 2,5 % des ouvriers qualifiés et 1,3 % des ouvriers non qualifiés.
Ce mode d’organisation du travail n’est pas adaptable à toutes les configurations de travail. En 2017, le télétravail est relativement fréquent pour les cadres commerciaux et technico-commerciaux (16,2 %), pour les ingénieurs de l’informatique (13,9 %) et au contraire, rare dans certains métiers comme, par exemple, ceux de l’hôtellerie, restauration, alimentation ou des services aux particuliers et aux collectivités. - Les salariés en télétravail régulier sont relativement plus stables et insérés dans l’emploi ; leur part augmente avec l’ancienneté dans l’établissement (3,6 % des salariés présents dans l’entreprise depuis 10 ans ou plus pratiquent un télétravail régulier contre 2,4 % des salariés présents depuis moins de 3 ans). Le cumul d’un temps partiel avec le télétravail reste peu fréquent, sauf pour les cadres (10,6 % des cadres à temps partiel pratiquent le télétravail de façon régulière).
- Les établissements du secteur privé où le télétravail se développe particulièrement sont ceux où les salariés ont une certaine autonomie dans l’organisation de leur travail (forfait jour pour les cadres, groupes projet, établissements en croissance). On ne peut toutefois savoir si la mise en place du télétravail a eu un impact sur la productivité de l’établissement.
- Femmes et hommes recourent au télétravail régulier dans des proportions équivalentes, notamment chez les cadres (11 %). Il est plus répandu chez les salariés âgés de 30 à 49 ans que parmi leurs aînés (50 ans ou plus) ou que chez les salariés de moins de 30 ans parmi lesquels la proportion de cadres est plus faible; pourtant, même parmi les cadres, les salariés les plus jeunes sont ceux qui pratiquent le moins le télétravail.
A quelle fréquence le télétravail ? Quels avantages ?
- Les télétravailleurs 3 jours ou plus par semaine occupent des postes particuliers et ont un profil diffèrent de celui de l’ensemble des télétravailleurs réguliers. Les femmes, les professions intermédiaires, les salariés du public et des établissements de moins de 50 salariés sont surreprésentés par rapport à l’ensemble des télétravailleurs réguliers. En 2017, 49,4 % des salariés en télétravail 3 jours ou plus par semaine sont des femmes (47 % de l’ensemble des télétravailleurs réguliers) ; 25 % appartiennent aux professions intermédiaires, alors que ces salariés ne représentent que 21,4 % de l’ensemble des télétravailleurs réguliers et 20,3 % des salariés.
- En 2017, 17,8 % des salariés pratiquant le télétravail trois jours ou plus par semaine sont en couple et vivent avec au moins un enfant de moins de 3 ans alors qu’ils ne représentent que 14,1 % de l’ensemble des télétravailleurs réguliers.
- La situation familiale joue : 4 % des salariés appartenant à une famille monoparentale et 4 % des salariés en couple avec un enfant de moins de 3 ans le pratiquent régulièrement. Ce phénomène est fortement accentué chez les cadres, avec 23 % de télétravailleurs réguliers parmi ceux appartenant à une famille monoparentale et 14,3 % parmi les membres d’un couple élevant un enfant de moins de 3 ans.
- Le télétravail est un moyen de limiter les longs déplacements entre domicile et travail ; ils résident 1,5 fois plus loin de leur lieu de travail que leurs collègues qui ne le pratiquent pas. Il s’accroît avec la distance du domicile au lieu de travail (9 % des salariés résidant à plus de 50 km de leur lieu de travail télétravaillent contre seulement 1,8 % des salariés travaillant à moins de 5 km de leur domicile).
- L’état de santé des cadres en télétravail régulier semble plus altéré que celui du reste des salariés (27,7 % contre 10,9 %); le télétravail semble néanmoins permettre des aménagements de poste pour des salariés en mauvaise santé.
Ou se développe le télétravail ?
- Le télétravail tend à se développer davantage dans les zones les plus denses. Il est plus fréquent en Île-de-France (5,5 % des salariés), notamment chez les cadres : un sur sept pratique régulièrement le télétravail, contre un sur dix dans le reste du pays. D’après l’enquête Reponse 2017, près d’un salarié résidant à Paris sur dix et près d’un salarié sur vingt résidant dans la couronne de l’aire urbaine de Paris télétravaillent. Il est également plus développé parmi les résidents des villes-centres des aires urbaines de plus de 500 000 habitants (3,9 % de télétravailleurs) que dans les banlieues et les périphéries de ces grandes aires urbaines (2,7 % des télétravailleurs).
- Le télétravail régulier est plus fréquent dans les établissements de grande taille (4,5 % de télétravailleurs dans les établissements de 500 salariés ou plus). Le recours au télétravail régulier est le même dans le secteur privé et dans la fonction publique. Les télétravailleurs du secteur public sont concentrés dans la fonction publique d’État où le télétravail des cadres (16,1 %) y est même plus fréquent que dans le privé (11,1 %); en revanche, il est très peu développé dans la fonction publique territoriale (1,2 %) et quasi inexistant dans la fonction publique hospitalière (0,1 %).
- 33,7 % des télétravailleurs intensifs sont salariés du secteur public contre 20,7 % de l’ensemble des télétravailleurs réguliers. Les télétravailleurs du secteur public sont concentrés dans la fonction publique d’État. Le télétravail des cadres (16,1 %) y est même plus fréquent que dans le privé (11,1 %). Le télétravail est, en revanche, très peu développé dans la fonction publique territoriale (1,2 %) et quasi inexistant dans la fonction publique hospitalière (0,1 %).
Il est le fait de salariés stables : 92,2 % sont en CDI et 87,4 % à temps complet (vs 79,6 % pour l’ensemble des salariés). Les salariés qui ont des responsabilités hiérarchiques ont une pratique du télétravail régulière fréquente, mais plus rarement intense.
Dans le secteur privé non agricole, 15,5 % des établissements de plus de 10 salariés ont mis en place le télétravail ; ils emploient 23,7 % des salariés; un salarié sur six le pratique, et ce quelle que soit la taille de l’établissement.
Dans le secteur de l’information et la communication, très utilisateur des nouvelles technologies et employeur fréquent de cadre, près de la moitié des établissements y ont mis en place le télétravail et plus d’un salarié sur quatre y recourt effectivement.
Vers une définition plus large du télétravail
- L’ordonnance du 22 septembre 2017 réformant le marché du travail a étendu le champ du télétravail et couvre désormais tout type de formalisation écrite, y compris, en l’absence d’accord collectif ou de charte, un accord écrit par courrier électronique.
En 2017, le télétravail fait ainsi l’objet d’une formalisation définie par un accord collectif (de branche ou d’entreprise) pour 2,7 % des établissements de plus de 10 salariés du secteur privé non agricole. 25 % des télétravailleurs sont couverts par ce type d’accords ; dans 12,8 % des établissements et pour 21,7 % des télétravailleurs, le télétravail est encadré par des règles définies par un accord individuel entre le salarié et sa hiérarchie. - Dans les établissements de 500 salariés ou plus, 56,7 % des télétravailleurs le pratiquent en suivant des règles découlant d’un accord collectif contre 4,1 % dans les établissements de 10 à 49 salariés. Les accords collectifs sur le télétravail sont très peu développés (1,4% des salariés en télétravail) lorsque l’établissement n’est pas doté de représentant du personnel. À l’opposé, les secteurs les plus actifs en matière de négociation collective comme l’industrie ou le secteur de la finance sont ceux où le télétravail est formalisé au niveau le plus élevé.
Dans le secteur de l’information et de la communication, près de la moitié des télétravailleurs sont couverts par un accord collectif. - Plus de la moitié des télétravailleurs sont dans les établissements dont le dirigeant ou le responsable des ressources humaines a déclaré qu’aucun de leurs salariés ne télétravaille. Ce télétravail informel et non encadré juridiquement est fréquent dans les plus petits établissements.
- En 2017, 4,2 % des salariés déclaraient pratiquer occasionnellement le télétravail (quelques jours ou demi-journées par mois), soit un peu plus que ceux qui déclarent une pratique régulière ; dans certains cas, il correspondait à des situations conjoncturelles (intempéries, jours de grève dans les transports, problème de santé, etc.). Selon cette définition élargie, le télétravail, occasionnel ou régulier, concernerait 1,8 million de salariés, soit 7,2 % de 2017. Sans surprise, les cadres sont les plus nombreux à avoir une pratique occasionnelle du télétravail (15,1 contre 4,2 % pour l’ensemble des salariés), suivis des professions intermédiaires (5,6 %).
- Le profil des télétravailleurs occasionnels est proche de celui des télétravailleurs réguliers, mis à part la taille d’établissement (surreprésentation des 10 à 49 et des 250 à 499 salariés). Il est légèrement plus fréquent pour les salariés en couple ayant un ou plusieurs enfants de 3 ans ou moins (4,9 % contre 4,2 %) et pourrait relever, dans certains cas, de la gestion d’urgence pour garder un enfant malade par exemple.
Par ailleurs, 8,3 % des salariés qui déclarent devoir toujours ou souvent travailler certains jours ou certaines semaines plus longtemps que l’horaire officiellement prévu et 17,8 % de ceux qui déclarent toujours ou souvent devoir accéder à leur boite à lettres professionnelle quand ils ne sont pas sur leur lieu de travail, en dehors de leurs horaires habituels, pratiquent également le télétravail quelques jours ou demi-journées par mois. - Le profil des cadres télétravaillant occasionnellement est un peu différent de celui des cadres en télétravail régulier. Les hommes cadres sont plus nombreux à pratiquer occasionnellement le télétravail ; la part des moins de 40 ans est supérieure à la moyenne, alors qu’ils sont sous-représentés parmi les télétravailleurs réguliers.
À l’inverse des autres régions, la part des cadres qui télétravaillent de façon occasionnelle en Île-de-France (13,3 %) est plus faible que la part de ceux qui y télétravaillent régulièrement (respectivement 14,1 %). Dans cette région où les temps de trajet domicile-travail sont les plus longs, le télétravail semble donc être plus souvent régulier et organisé.
Pour en savoir davantage :
https://dares.travail-emploi.gouv.fr/
Source : "Quels sont les salariés concernés par le télétravail ? ", Dares Analyses N°051, novembre 2019
Définition du télétravail :
Le télétravail est défini comme une forme d’organisation du travail, utilisant les technologies de l’information et de la communication (TIC), dans le cadre d’un contrat ou d’une relation d’emploi dans laquelle le travail, qui aurait également pu être réalisé dans les locaux de l’employeur, est effectué hors de ces locaux de façon régulière. Les lieux d’exercice peuvent être le domicile, un centre ou un site de bureaux partagés, un tiers-lieu, etc. Les outils numériques (messagerie distante, connexion à distance au réseau de l’entreprise, etc.) sont le support de ce télétravail car ils permettent le travail à distance et facilitent la communication entre le salarié en télétravail et le reste de l’équipe.
Ne sont toutefois pas en télétravail les salariés dits nomades ou mobiles, amenés, dans le cadre de leur fonction, à se déplacer fréquemment en dehors de l’entreprise (nomadisme extra-entreprise), ou travaillant dans l’entreprise mais pas à leur poste (salle de réunion, transports en commun ; nomadisme intra-entreprise), grâce à internet ainsi qu’aux nouvelles technologies (ordinateur portable, tablette, smartphone).
Source : les enquêtes Sumer 2017 et Reponse 2017 intègrent des questions sur le télétravail et permettent donc d’en mesurer directement la pratique parmi l’ensemble des salariés, à partir de données représentatives et selon des critères précis définissant le télétravail.
La dernière édition s’est déroulée en France métropolitaine et dans les Drom de juin 2016 à septembre 2017 : 26 500 salariés ont répondu à l’enquête, interrogés par 1 200 médecins du travail ou de prévention ; 98% des répondants ont accepté de renseigner l’auto-questionnaire. Ces salariés sont représentatifs de près de 24,8 millions de salariés.