Une approche globale.
Fin 2022, les Urssaf recensent 4,3 millions de comptes de travailleurs indépendants (TI), mais en fait 3,595 millions actifs économiquement. Ils progressent de 4 % entre 2021 et 2022 et de 18,1 % depuis 2018.A titre de comparaison l’Insee dans son récent ouvrage “les entreprises en France” chiffrait les TPE (très majoritairement des indépendants) à 4,3 millions fin 2021et par ailleurs 280 000 sociétés (dont la moitié serait à gérance minoritaire ou par action).
Les autoentrepreneurs sont 56,2 % des immatriculés ; ils étaient 47 % en 2019. Cela étant, si l’on ne prend en compte que les actifs économiques, ils ne sont plus en 2022 que 47,2 %.
En 2022, les artisans, commerçants sont 63 % des indépendants actifs économiques et les professions libérales 37 %, mais avec des progressions 2021-2022 plus favorables aux professions libérales (+13 % vs +3,5 % pour les artisans, commerçants), mais aussi entre 2019 et 2022 (+22,6 vs +15,2 %).
La progression entre 2021 et 2022 des autoentrepreneurs (AE) actifs a été de 6,9 % vs 1,5 % pour les indépendants (TI) classiques (autres entreprises individuelles+ sociétés à gérance majoritaire) et entre 2019 et 2022 de 18,1 % vs 2,4 %.
Pour mémoire les AE inactifs libéraux sont 34 % vs 66 les artisans/commerçants à un niveau proche de la répartition pour les AE actifs économiques.
Caractéristiques des actifs par sexes et âges fin 2022
Les femmes sont en moyenne 40 % des indépendants, un peu plus autoentrepreneures (41,7 %) que de TI classiques 37,9 %).Les différences sont plus marquées en ce qui concerne les tranches d’âge : 46,5 % des AE actifs ont moins de 40 ans vs 27,2 % les TI classiques ; à l’inverse les TI classiques ont bien plus souvent 50 ans et plus (45,2 % vs 30,3).
Pour mémoire, les hommes AE inactifs sont un peu plus fréquents que les femmes (64,7 % vs 35,3 à comparer pour les AE éco actifs 55,5 % vs 44,5).
Les polyactifs
29,6 % des AE eco actifs sont en polyactivité (salariés par ailleurs) vs 11,1 % des TI classiques. S’il y a peu de différences entre les sexes et un peu plus dans les tranches d’âge dans les 2 catégories, les TI classiques de moins de 40 ans sont un peu plus polyactifs que les 50 ans et plus, tout comme les AE eco actifs.Les TI classiques des secteurs de la médecine générale et de la médecine spécialisée comptent respectivement 25 et 35 % d’indépendants avec une activité salariée par ailleurs. Parmi les 14,6 % de TI classiques polyactifs dans la santé, près de la moitié est salariée dans les activités hospitalières. Le second secteur qui emploie les TI de la santé est l’enseignement, dans le supérieur pour la quasi-totalité. Par ailleurs, la polyactivité dépasse 20 % dans le secteur des activités sportives.
Les polyactifs au sein des autoentrepreneurs sont bien plus localisés dans les activités sportives (46 %), les livraisons à domicile (45 %) et de l’enseignement (44 %). Ces derniers exercent une activité salariée dans l’enseignement (29 %) et l’administration publique (26 %), qui comprend notamment des organismes de formation professionnelle.
En revanche, les secteurs du BTP travaux de finition, BTP gros œuvre et commerce de détail sur marchés se distinguent par un faible taux de polyactivité (de l’ordre de 10 %).
Si en majorité la polyactivité s’exerce dans le secteur privé, le secteur public concerne près de 4 % des TI classiques ; de fait, 2 secteurs de la médecine (générale et spécialisée) sont polyactifs pour près 3/4 dans le secteur public, mais ces 2 secteurs se caractérisent par une sur-représentation des indépendants avec un cumul de contrats salariés dans le public et dans le privé (’intervention dans plusieurs types d’établissement : hôpitaux publics, cliniques, EHPAD…).
La part des AE exerçant dans le public est la plus élevée dans les secteurs de l’enseignement (20,6 %), les autres services de santé (16,2 %), les activités sportives (14,8 %) et l’action sociale (13,2 %). Dans l’enseignement, près d’un tiers des AE polyactifs exercent une activité salariée exclusivement dans le secteur public.
L’évolution du nombre d’indépendants par régions.
En 2022, si toutes les régions connaissent une hausse du nombre de travailleurs indépendants, le rythme n’est pas aussi soutenu qu’en 2021. Seule la Corse fait figure d’exception, puisque l’évolution de ses effectifs (+ 6,2 %) est similaire à celle de l’année précédente.Avec des baisses respectives de 3,8 et 3,6 points par rapport à 2021, le Nord-Pas-de-Calais et l’Ile-de-France connaissent les plus forts ralentissements. Le Nord-Pas-de-Calais reste néanmoins sur une dynamique (+ 6,4 %) plus marquée que celle enregistrée au niveau national.
13 autres régions dépassent le taux de croissance national (+ 5,8 %), dont Paca (+ 7,4 %), Alsace (+ 7,2 %) et Champagne-Ardenne (+ 6,8 %).
A contrario, les régions Midi-Pyrénées (+ 4,8 %) et Bourgogne (+ 4,8 %) connaissent les croissances les plus modérées.
Dans plus de 85 % des régions métropolitaines (19 sur 22), le statut d’auto-entrepreneur domine parmi les travailleurs indépendants, notamment en Ile-de-France (64,4 %), du fait des activités de livraison à domicile.
Certaines régions telles que la Bretagne, la Basse-Normandie et les Pays de la Loire maintiennent une majorité de TI classiques. En outre, plusieurs régions affichent une hausse
du nombre de TI classiques significativement plus élevée que la moyenne nationale (+ 1,5 %) : la Guyane (+ 3,4 %), la Martinique (+ 2,8 %), l’Alsace (+ 2,6 %), l’Ile-de-France (+ 2,4 %) et La Réunion (+ 2,1 %).
Le nombre d’indépendants et leur évolution par activité fine
3,466 millions sont actifs économiquement dont 45,6 % d’AE eco actifs♦ 3 groupes d’activités regroupent près de 60 % des activités : les services aux entreprises (22,2 % avec 51 % d’éco actifs), le commerce (19,6 % avec 38,9 % d’AE éco actifs) et la santé (17 % avec 15 % d’éco actifs). Si l’on ajoute les services aux particuliers (13,5 % avec 73,2 % d’AE eco actifs) et la construction (11,7 % avec 46,4 % d’AE eco actifs), ce sont 84 % des activités.
♦ Si par contre, on s'attache à observer les taux d'AE eco actifs : sont mis en avant l’enseignement (83 % d’AE éco actifs parmi les indépendants), puis les services aux personnes (73,2 %, mais 80 % pour les arts et spectacles et à l’opposé 56 pour la coiffure et soins de beauté), puis l’industrie (66,6 %), et le transport/entreposage (58,8 % dont 94,6 pour la livraison à domicile ; noter que les taxis/VTC ne sont que 30 %) ; viennent ensuite les services aux entreprises (50,7 %, mais 86 % le nettoyage, 84 % le graphisme et 1,7 % les activités juridiques).
Le BTP affiche un taux moyen (46,4 %), quel que soit le groupe d’activité.
Suivent des activités dont les taux sont inférieurs à la moyenne : le commerce (38,9 % mais 82 % pour le commerce sur les marchés, et seulement 24 à 34 % pour les HCR) ; viennent ensuite des activités habituellement règlementées quant à l’accès à l’AE que sont les activités immobilières (35 %), les activités financières (19,9 %) et la santé (15,2 %).
♦ En termes d’évolution 2021/2022, le tableau Urssaf ne permet de connaitre que celle des TI classiques : alors que l’évolution totale est de 1,5 %, certaines activités ont des évolutions plus importantes, telles la livraison à domicile (+40,2 %), l’action sociale/ l’aide à domicile (+10,2 %), les services aux entreprises avec les services d’administration et de gestion (+5,3 %), l’informatique (+4,6 %), le conseil pour les affaires (+4,2 %), mais aussi le nettoyage (4,8 %). Noter au sein du commerce la régression de la vente sur les marchés (-4,3 %)
Les revenus 2022 pour les AE et 2021 pour les TI classiques
♦ Une approche globale par sexe : les hommes ont des revenus moyens plus élevés que les femmes en 2021 (49 304€ vs 39 363€), mais les femmes ont connu une hausse plus importante entre 2019 et 2021 (+8,9 % vs +6,4).♦ Les revenus des TI classiques sont nettement plus favorables aux professions libérales (67 018€ en 2021, vs 29 463€ pour les artisans/commerçants). L’évolution 2020/2021 est aussi un peu plus favorable aux libéraux (+11,3 % vs +9,5 %), du fait d’un rattrapage pots covid alors que les artisans/commerçants ont connu une évolution un peu plus favorable entre 2019 et 2021 (+7 % vs +5,7 %).
A titre de comparaison sommaire, la rémunération déclarée des dirigeants adhérents à CPME (taille moyenne des entreprises plus élevée et tout type de structure juridique) en décembre 2023 était : pour 20 % au plus 1 400€ mensuels (au niveau du Smic), pour 31 % entre 1 400 et 2 600€, pour 25 % entre 2 600 et 4 000€et pour 25 % au-delà de 4 000€.
♦ Les revenus des AE chiffent en moyenne 7 449€ en 2022, en hausse de 8,9 % entre 2021 et 2022, de 14,3 % entre 2020 et 2021 et de 16,3 % entre 2019 et 2022.
Les revenus sont toujours plus élevés pour les libéraux en 2022 (8 454€ vs 6 847€) ; idem pour les hommes au regard des femmes (8 135€ vs 6 598€).
♦ On constate une nette hausse des revenus moyens des TI classiques dans toutes les régions, celle des parties nord et nord-est demeurent celles qui affichent les revenus moyens les plus élevés ; le revenu moyen est à son plus haut niveau en Ile-de-France (58 824€), suivie du Nord-Pas-de-Calais (51 388€) et de la Lorraine (48 478€). 4 autres régions maintiennent des revenus moyens supérieurs à la moyenne nationale (45 581€) : la Picardie (47 814€), l’Alsace (47 909€), la Haute-Normandie (47 685€), et Champagne-Ardenne (46 564€).
3 régions d’Outre-mer continuent d’afficher les revenus moyens les moins élevés : la Réunion (38 171€), la Martinique (34 825€) et la Guadeloupe (29 965) ; toutefois, les Drom connaissent globalement des hausses de plus de 15 %, 5 points de plus que la moyenne nationale.
7 régions métropolitaines affichent également des hausses de revenus supérieures à la moyenne nationale, dont la Corse (+ 13,5 %), de l’Ile-de-France (+ 11 %), et PACA (+ 11 %).
A l’inverse, la Basse-Normandie enregistre la plus faible progression avec + 8,5 % en 2021.
Dans un contexte où l’inflation a atteint des niveaux records en 2022 (5,2 % en moyenne), la croissance des revenus moyens en euros courants est à relativiser.
L’évolution des revenus par activité fine.
♦ En ce qui concerne les TI classiques les revenus les plus élevés appartiennent souvent aux professions règlementées : médecine spécialisée/laboratoires (136 234€ en 2021 et +10 % au regard de 2020), pratique dentaire (118 754€ et +14,6 %), activités juridiques (100 612€ et +9,1 %), médecine générale (92 308€ et +11,1 %), pharmacie (83 347€ et +10 %).Sont dans la moyenne de 45 481€, des activités comme les services à valeur ajoutée aux entreprises (entre 46 612 pour l’informatique et les activités comptables et d’ingénierie 52 855€), les professions paramédicales (44 096€ et +10,9 %).
Les revenus des activités comparées au smig annuel (en 2021,14 773€ nets à temps complet) au sein des TI classiques sont : la livraison à domicile (8 877€) et la vente sur les marchés (8 850€), puis les activités sportives (10 685€), les taxi/VTC (14 188€), les réparations hors auto (18 527€) et les HCR (entre 18 573 et 20 938€).
Les revenus des autres activités évoluent entre 22 000 et 40 000€.
♦ En ce qui concerne les AE éco actifs, la moyenne est de 7 449€, avec une progression entre 2020 et 2021 de 8,9 % entre 2021 et 2022, après +14,3 % entre 2020 et 2021.
Les revenus supérieurs à 12 000€ sont ceux des activités juridiques (16 466€), des activités immobilières (13 770€), des professions paramédicales (13 480€), de l’informatique (12 171€).
53,5 % perçoivent un revenu inférieur à 4 000€ en 2022. Les activités aux rémunérations les plus faibles sont celles de la livraison à domicile avec 1 558€ et du commerce sur les marchés (3 271€)
Pour en savoir davantage : "En 2022, malgré un ralentissement, l’auto-entrepreneuriat reste le principal moteur de la croissance démographique des travailleurs indépendants", Urssaf, Stat'Ur N°373, décembre 2023
Sources : comptes de cotisants indépendants immatriculés à la Sécurité sociale et relevant de la protection sociale des indépendants, ce qui exclut les dirigeants de certaines sociétés (SA, SAS et SASU), mandataires sociaux ou gérants minoritaires de SARL, qui sont considérés comme assimilés salariés.
Rappelons qu’en cas de chiffres d’affaires nuls ou non déclarés sur 24 mois ou 8 trimestres consécutifs, les AE sont automatiquement radiés.
Pour les analyses sur les revenus des TI classiques, les taxations d’office en sont pas comptabilisées. Par ailleurs, les données mobilisées ne permettent pas de connaître les déficits : un revenu négatif est indiqué comme nul.
Rappelons aussi que les revenus pris en compte sont ceux déclarés, qui peuvent différer de ceux effectifs (paiement en espèces non enregistrés, autoconsommation non prise en compte..).
Fin 2020, l’Insee recensait 3,6 millions de personnes exerçant une activité non salariée et générant un revenu dont 427 000 exploitants agricoles (3,2 millions hors agricole). L’Urssaf Caisse nationale comptait 3,8 millions de comptes de travailleurs indépendants inscrits en fin d’année dont 3,2 millions généraient un revenu.
L’Urssaf semble ignorer les microentreprises ? Compte tenu de la faiblesse des rémunérations observées, les microentreprises devant payer leurs cotisations sociales aux régimes des indépendants, et non dans le cadre forfaitaire, seraient exclus de ces chiffrements.