Fondation d'entreprise
 
 
André Letowski
Emploi 
14 aoû 2024

Apprentissage : les taux de rupture et leurs évolutions depuis 2017

Les taux de rupture, s’ils sont moins élevés dans des activités tertiaires, dans des moyennes et grandes entreprises, et dans les formations supérieures préparées, ces taux y ont paradoxalement fortement progressé depuis 2017.
21 % des contrats d’apprentissage commencés en 2022 sont rompus au cours de leurs 9 premiers mois d’exécution (vs 18,9 en 2017). À la suite de cette rupture, l’apprenti peut commencer un nouveau contrat dans les 2 mois (6 %), ou entre 2 mois et jusqu’à six mois après (2 %).

Qu’en est-il selon les profils des apprentis et des entreprises employeurs ?

♦ Selon le profil de l’apprenti

Les ruptures sont plus fréquentes pour les apprentis les plus jeunes, qui préparent plus souvent des formations de niveau CAP à bac+2 (25,4 % pour les 15-17 ans vs 24,5 pour les 18-19 ans et 18-22 % au-delà). Rappelons qu’en 2022, 19 % ont entre 15 et 17 ans, 23 % 18-19 ans, 26 % 19-21 ans et 32 % 22 ans et plus.
– Selon les formations initiales des apprentis, les taux varient : dans le secondaire, 26 % des contrats sont rompus contre 18 % dans le supérieur. Ils sont de 29,9 % pour les sans diplômes, de 24,2 pour les diplômés du CAP, de 23,9 pour ceux du bac mais de 13,7 % pour les bac+2 et au-delà,
Le taux est un peu plus élevé pour les femmes (23 % vs 19,5 pour les hommes),
– Ils sont de 34 % pour ceux en recherche d’emploi, de 27 % pour les stagiaires en formation professionnelle et de 31,4 % pour les inactifs,
Ceux habitant en QPV connaissent plus de rupture (28,1 % vs 20,5 les autres).

♦ Selon le type de contrat

– Ils sont de 24,5 % pour les contrats longs et de 18,3 pour les contrats courts, mais de 19,7 pour les contrats aidés,
– Les taux de radiations sont plus élevés pour ceux qui préparent une formation de niveau CAP (29,3 %) ou de niveau bac+2 (26,2 %), et nettement moins pour ceux qui préparent une formation de niveau au moins bac+3 (11-9 à 14,5 %) ; ceux qui préparent une formation de niveau bac ont un taux de 22,5 %.

♦ Selon le profil de l’entreprise

– Au regard de la taille : les moins de 10 salariés connaissent les taux les plus élevés (27,6 % pour les 0-4 salariés, 26,1 pour les 5-9 salariés), puis les 10-49 salariés (21,5) et enfin les 50 salariés et plus (11,4-13,7),
Au regard des secteurs d’activité : les taux de rupture les plus élevés sont le fait des HCR (36 %), de la coiffure et salons de beauté (30,4), des commerces de bouche (28,4), des commerces (25,6). Ces secteurs accueillent majoritairement des apprentis du secondaire.

L’évolution dans le temps

♦ Les secteurs et niveaux de formation où les taux de rupture progressent le plus en 5 ans sont aussi ceux qui sont les plus dynamiques en termes d’entrées en apprentissage.

L’ancienneté des employeurs dans l’apprentissage réduit globalement la probabilité de rupture des contrats. Les employeurs avec le plus d’ancienneté dans l’apprentissage sur les 10 dernières années pourraient avoir progressivement acquis de l’expérience dans l’accueil d’apprentis, de l’étape du recrutement (détection des jeunes les plus motivés) à l’encadrement au quotidien (formation des maîtres d’apprentissage) ; un effet de sélection est également possible : parmi les employeurs ayant accueilli dans le passé des apprentis, seuls ceux qui ont des expériences positives continueraient d’en recruter.

♦ Le taux de rupture à 9 mois des contrats d’apprentissage en 2022 (21,1 %) est plus élevé que ceux constatés pendant la crise sanitaire (17 % pour les contrats commencés en 2019 et 16 % pour ceux commencés en 2020), et avant la crise (18,9 % en 2017).
Il faut rappeler que la législation et les pratiques ont changé entre 2017 et 2022 : en effet le nombre d’apprentis a beaucoup évolué, passant de 289 938 en 2017 à 811 511 en 2022 (triplant quasiment).

Paradoxalement, les taux de rupture augmentent bien plus pour ceux inscrits dans une formation du supérieur : si les taux de rupture sont faibles pour ceux préparant une formation de niveau au moins bac+3 (11,9 à 14,5 %), l’évolution des taux de rupture y est plus que forte (entre un doublement et quasi triplement), alors que la hausse pour les formations de CAP n’est que de 3,9 %.



♦ De même les taux de rupture sont faibles dans les entreprises de moins de 10 salariés (de 4,8 à 6,1 %) alors qu’elles embauchent 45 % des apprentis ; ils sont bien plus élevés dans les entreprises de plus de 50 salariés (entre 36 et +71).




♦ Par rapport aux contrats commencés en 2017, les taux de rupture doublent pratiquement dans des secteurs peu concernés historiquement par les ruptures (informatique, communication, activités financières et assurance, enseignement, santé et action sociale) et sont faibles dans les activités “traditionnelles” telles le commerce, le commerce de bouche, la construction, les services aux particuliers, l’agriculture et sont même inférieurs pour les HCR.


Pour en savoir davantage : "Ruptures des contrats d’apprentissage : quelles évolutions depuis la réforme de 2018 ?", Dares Analyses, N°43, juillet 2024


 
André Letowski est expert en entrepreneuriat, en petites et très petites entreprises. Il publie une note mensuelle regroupant une sélection brute ou retravaillée et commentée des corpus statistiques français, des enquêtes et publications concernant le domaine des TPE, PE et PME.




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